Summary: | Alors que la notion de centre, très liée à celle du pouvoir, a longtemps été au cœur des enjeux culturels, sociaux et littéraire, l’importance des marges, lieu métamorphique de transition et de différence, est désormais réhabilitée. Durant la Renaissance, l’espace marginal s’assimile fréquemment à celui du labyrinthe, figure mythique tant attractive que répulsive, ré-inventée et remaniée à l’envi comme tant d’autres mythes au cours du seizième siècle. Les textes de trois grands dramaturges que furent Marlowe, Peele et Shakespeare en témoignent : lorsqu’ils abordent des thèmes tels que la réclusion, l’intimité, la déviance ou les stratégies de l’oblique, l’image du labyrinthe est convoquée et permet de décrire une réalité marginale où la parole se délie et le regard critique se développe, et qui, insensiblement, se mue peu à peu vers le centre. On peut dès lors se demander si les méandres où évoluent les personnages ne constituent pas, dans une moindre mesure, une véritable passerelle vers le pouvoir : errer dans l’espace liminal des marges, à la Renaissance, revient aussi à conquérir une individualité et une liberté qu’il faut parfois payer au prix fort. C’est cette thématique féconde et complexe à la fois que nous nous proposons d’aborder dans cet article, en prenant appui sur les textes de l’époque, afin de mieux comprendre les sensibilités et les représentations des contemporains de Shakespeare.
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